Aller au contenu

Nouvelles / Actualités

| Actualités

Établissement de la quatrième Maison mère de la Congrégation sur la rue Saint-Jean-Baptiste (1844-1880)

Le 1er mai, fête des apôtres saint Philippe et de saint Jacques, fut le jour fixé pour commencer à démolir notre ancienne et vénérable bâtisse, où tant de courageuses et vraies filles de notre Fondatrice s’étaient sanctifiées elles-mêmes dans la pratique de nos saintes règles, et avaient contribué au salut d’un si grand nombre d’âmes, tant par leurs vertus et leurs prières que par leurs instructions. (…)

Cependant les opinions étaient partagées au sujet de la bâtisse; ce qui occasionna beaucoup de tracasseries et de difficultés. On présenta plusieurs plans aux membres du chapitre. Le premier était de bâtir sur la rue Saint-Jean­Baptiste. Mais, objectait-on, que faire d’un bâtiment construit depuis peu sur cette rue, lequel servait de boulangerie, de logement (…).

Ce bâtiment avait coûté 500 louis… le démolir? Les consciences se trouvaient extrêmement gênées… le vœu de pauvreté pouvait en souffrir. D’ailleurs, on n’aimait pas la rue Saint-Jean-Baptiste, à cause du bruit des voitures.

Un autre plan était de bâtir sur les anciennes fondations, en travers du terrain, joignant notre église bâtie par Mlle Jeanne Le Ber. On aurait élargi les murs de quelques pieds et élevé plusieurs étages. Ce plan donnait peu de logement pour la Communauté, coupait le terrain, masquait absolument notre pensionnat, lui ôtait l’air et la vue.

On proposa un autre plan, pour entrer dans les vues de celles qui désiraient que la bâtisse fût en travers du terrain et qu’on agrandît le chœur de l’église, c’était de prolonger l’église, en descendant dans le bas du jardin du côté des religieuses. Ce plan offrait de graves inconvénients, et nécessitait un long chemin couvert pour communiquer de l’église au pensionnat; les enfants auraient eu à souffrir du froid en hiver.

Avec tous ces plans rien n’avançait, et toutes souffraient plus ou moins des débats. Mgr de Montréal était en visite pastorale … M. Quiblier, notre supérieur, voyant que nous ne pouvions nous entendre, ne voulut plus se mêler de l’affaire, et nous dit de nous adresser à Monseigneur. Plusieurs lettres furent écrites à Sa Grandeur avec les plans proposés, les raisons pour et contre (…).

En même temps, Mgr recommandait très spécialement aux Sœurs de construire la maison non pour elles, mais pour l’avenir. De son côté M. Quiblier, qui fut plusieurs semaines sans paraître à la Communauté, répondait par écrit aux explications qui lui étaient demandées, et recommandait aux Sœurs de ne pas s’exposer à mériter les reproches de celles qui leur survivraient, ou qui viendraient après elles. Ayant reçu ordre de Mgr d’approuver le plan, il alla faire la visite du terrain avec les Pères Honorat et Telmont; tous trois décidèrent qu’on ne devait pas craindre de démolir la bâtisse de 500 louis pour placer la Communauté; que cette partie du terrain était précisément la meilleure place pour la vue, l’air et la communication avec le pensionnat. Ceci fut communiqué au chapitre, dont la majeure partie persista à tenir aux anciennes fondations. M. Quiblier refusa d’approuver ce plan… (…)

Cette lettre fut reçue par Mère Sainte-Madeleine avec la plus profonde reconnaissance; mais elle ne jugea pas prudent d’en donner connaissance à la Communauté, vu la forte opposition de certains esprits. Après avoir prié et réfléchi sérieusement, elle se sentit pressée de convoquer une assemblée des plus anciennes missionnaires, lesquelles étaient intéressées comme les autres à ce que la bâtisse fût faite convenablement, non pour le présent, mais pour l’avenir. Ayant communiqué sa pensée au chapitre, toutes l’approuvèrent; et, en réponse à la lettre de M. Quiblier, elle l’informa de cette décision, qui lui fit plaisir. Aussitôt une lettre circulaire fut envoyée dans toutes les missions… les Sœurs répondirent promptement à l’appel qui leur était fait; et après plusieurs assemblées pendant lesquelles on examina et expliqua les plans, on en pesa les inconvénients et les avantages, la pluralité des voix fut pour bâtir sur la rue Saint-Jean-Baptiste. La détermination de la Communauté fut approuvée officiellement par M Quiblier, supérieur; et on se mit à l’œuvre. Ce fut le 2 juillet, fête de la Visitation, qu’on commença à poser les fondations du nouvel édifice.

Depuis le commencement de mai, la petite église Notre-Dame-de-la-Victoire servait de chapelle de Communauté. A la fin d’octobre, il devint impossible pour un nombre de Sœurs faibles et infirmes de s’y transporter pour la messe … et le très saint Sacrement fut transporté dans la chambre de dessin du pensionnat. C’est là que Mère Saint-Victor prit le saint habit le 9 janvier 1845, et que Sœur Saint­Georges (Lemoyne) fit profession, le 3 février.

Cependant les travaux de la bâtisse commencés le 2 juillet, avançaient rapidement; la maçonnerie fut achevée dans l’automne et put recevoir la couverture … l’intérieur fut fait dans le cours de l’été suivant, en grande partie … Et le 15 septembre 1845, eut lieu la première réunion dans la nouvelle communauté.

«Aujourd’hui, octave de la Nativité, écrivait une Sœur de ce temps, notre excellent Père, M. Quiblier, et notre chère Mère supérieure ont présidé à une réunion, la plus belle que mes yeux aient contemplée: Quatre-vingt-seize Sœurs, rangées autour de la salle de communauté, qui vient d’être achevée. Jamais, depuis la fondation de cette institution, avait-on vu tant de filles de la Sœur Bourgeoys réunies ensemble, et présidées par un Père et une Mère plus respectés… »

Tiré de : Histoire de la Congrégation de Notre-Dame de Montérla, Troisième partie – X1Xe siècle, volume VIII, 1840-1849