« Se rendre habiles en toutes sortes d’ouvrages »
Marguerite Bourgeoys dans ses Écrits rappelait que « Les Sœurs doivent prendre peine de se rendre savantes et habiles en toutes sortes d’ouvrages » ; elle souhaitait également que « dans la maison, les Sœurs soient égales, en sorte que la Supérieure, après sa démission, peut être cuisinière, ou autre emploi où elle sera trouvée propre; et la cuisinière, Supérieure, ou être, toute sa vie, aux gros ouvrages. Tout cela pour imiter la vie et les vertus de la Sainte Vierge. » Cette biographie de sœur Saint-Pierre, qui fit profession en 1764, démontre qu’il en était bien ainsi :
Après sa profession, Sœur Saint-Pierre fut envoyée missionnaire à Lachine; lors de l’incendie, elle avait pour compagne Sœur SainteMarie (Martel), et la supérieure de la Communauté confia à leurs soins Sœur des Séraphins (d’Ailleboust) qui mourut entre ses bras. (…) Cette même année, elle fut rappelée et envoyée à Saint-Laurent; en 1769, elle fut placée à Pointe-aux-Trembles de Montréal… En 1772, on la désigna pour rétablir la mission de Champlain, avec Sœur Sainte-Claire (de Lantagnac); en 1776, elle revint à Pointe-aux-Trembles de Montréal. En 1779, elle fut nommée infirmière; 1780, lingère; 1781, infirmière; 1782, sacristine. En 1784, elle fut envoyée à Boucherville; en 1788, à Pointe-aux-Trembles de Montréal. 1790 la vit portière; 1791, sacristine et portière; 1792, infirmière. En 1794, elle fut chargée de la petite école; en 1795, elle alla à Saint-Laurent; en 1797, elle fut nommée sacristine; en 1800, missionnaire à Laprairie. Rappelée de cette mission le 12 septembre 1803, à raison d’infirmités, elle fut chargée de la petite école: en 1807, on la nomma réfectorière… et en 1809; âgée de 70 ans, elle fut chargée d’aller au secours de Sœur Saint-Jérôme pour rendre les derniers devoirs à Sœur Saint-Vincent-de-Paul, mourante à Saint-Laurent. La Communauté avait compté sur elle pour remplacer la défunte; mais elle demanda son retour, à cause de son grand âge et de ses infirmités, ce qui lui fut accordé par le conseil, le 27 avril 1810. Depuis lors jusqu’à 1814, elle remplit les fonctions de portière et d’excitatrice. Âgée de 75 ans, elle fut déchargée d’office, et s’employa à tricoter des bas, soit pour les Sœurs, soit pour vendre au profit de la Communauté; cultivant en même temps un piment et du basilic, dont elle donnait le produit à la pharmacienne. Partout et toujours Sœur Saint-Pierre se montra un modèle de complaisance et de bonté … Lorsqu’elle était employée aux offices de la maison, elle ne manquait pas, les jours de promenade, de s’offrir pour remplacer les maîtresses du pensionnat; et les élèves, qu’elle savait intéresser par de jolies histoires, la voyaient toujours arriver avec plaisir. À cette époque, les novices n’avaient pas de café; Sœur Saint-Pierre passait le sien à quelqu’une d’entre elles. (…) Il était d’usage alors que les portions des repas, midi et soir, fussent servies dans des saucières et mises à la place des Sœurs. Or, les jours d’abstinence, Sœur Saint-Pierre se rendait d’avance au réfectoire pour préparer le poisson de celles qu’elle savait très occupées, ayant soin de bien enlever les arêtes. « Ces pauvres Sœurs, disait-elle, parlant des maîtresses du pensionnat, il faut qu’elles se hâtent de manger pour sortir de table; leur dîner pris trop vite, se digérerait mal. » Ainsi s’écoula sa vie jusqu’à l’âge de 86 ans.
Histoire de la Congrégation de Notre-Dame de Montréal, troisième partie XIXe siècle, Volume VII, 1822-1940.